En termes de biens immobiliers (prix, activité, demande…), y aura-t-il un « avant » et « après » Covid ?
Michel Mouillart : Pour savoir s’il y aura un « après », ilfaudra attendre début septembre et voir comment la demande va évoluer. Ce n’est qu’alors, et pas avant, que nous pourrons dire s’il y a eu un « après ». Quant au « front », nous nous souvenons que le marché du logement était déjà revenu en novembre et décembre 2019 et que les deux premiers mois de 2020 avaient confirmé la contraction de l’activité immobilière. Pour les mois de janvier et février, le nombre de vieilles maisons acquises par des particuliers a déjà diminué de 8% par rapport à la même période en 2019.

La confiance des propriétaires de projets immobiliers est meilleure aujourd’hui qu’elle ne l’était pendant la crise des subprimes
La situation exceptionnelle que nous connaissons est-elle nouvelle ?


Les familles plus petites et les jeunes acheteurs pour la première fois ont dû quitter le marché du logement
Une lecture du baromètre LPI Seloger montre que les prix continuent d’augmenter tandis que les ventes sont en baisse. Certains d’entre eux sont incroyables…
Michel Mouillart : Cette augmentation de prix est basée sur deux explications. D’une part, quand un marché s’effondre, comme une baisse de 62% du nombre de compromis signés en comparant les mois de mars à mai 2020 avec le même en 2019, il y a une réduction conjointe de l’offre et de la question. Pour ceux qui apportent des biens à l’ancien marché du logement, ce sont, par exemple, les familles revendiquent pour acheter : les secundo-accesseurs, bien sûr, mais aussi les premiers acheteurs qui ont revendu un logement à louer ou une résidence secondaire. Par par conséquent, la demande diminue généralement au même rythme et à peu près aux mêmes proportions que l’offre. En conséquence, la situation de pénurie qui a touché certains territoires avant la crise est toujours présente aujourd’hui et devrait se poursuivre.
L’ autre explication n’est rien de plus que la transformation du marché de l’habitation hexagonale. Suite aux décisions prises par la Banque de France fin 2019 de resserrer les conditions d’octroi de prêts immobiliers, de petits ménages et de jeunes acheteurs, ils ont dû quitter le marché du logement. Cependant, les acheteurs d’une première maison ne peuvent pas se permettre d’acheter des maisons coûteuses en tant qu’acheteurs secundo. En bref, ceux qui sont à l’origine du rebond technique que j’ai mentionné ci-dessus sont les familles les plus riches qui ont pu continuer à obtenir leurs prêts immobiliers parce qu’ils avaient une contribution importante et qu’ils avaient un faible taux d’effort.
Si ce chiffre est réduit de 30 %, on s’attend à ce que 800 000 transactions soient réalisées d’ici 2020. Ce qui n’est pas si mauvais pour une année de crise.

Mais la question est également de savoir si le rythme des nouvelles transactions, c’est-à-dire des ventes non recouvrées, reviendra à son niveau d’avant la crise ? Prouver vers un retour progressif à normalité qui pourrait prendre de longs mois. Mais encore une fois, je tiens à souligner que la baisse des transactions a pour origine la restriction du marché et le gel des transactions immobilières. Pour ce qui est des prix de vente, le baromètre LPI Seloger donne une moyenne nationale. Donc, ce n’est qu’un indicateur. En fait, le marché immobilier hexagonal se compose de marchés immobiliers locaux ayant chacun leurs propres caractéristiques spécifiques. Chacun de ces marchés se caractérise par une tendance à la fois haussière et baissière. On n’a pas besoin de faire des généralités. Malgré la crise, les prix dans certaines régions continueront d’augmenter. Cela est dû à l’attractivité économique, aux pénuries d’offre, aux mouvements démographiques qui ont entraîné un changement de la demande et une pression accrue sur les prix. Mais dans d’autres régions, les prix des maisons vont baisser.
À mon avis, la vraie question n’est pas tant ce qui s’est passé tout au long de l’année 2020 comme ce qui se passera dans les prochains mois.
D’ autre part, lors de l’analyse et de la comparaison des prix immobiliers, il est important de spécifier la temporalité , l’échelle de temps sur laquelle il se trouve. Nous regardons l’année 2020 entière, bien qu’il y ait eu de fortes augmentations au cours des premiers mois et que la crise sanitaire n’ait pas encore commencé. À mon avis, la vraie question n’est pas tant ce qui s’est passé au cours de l’année 2020 que ce qui se passera au cours des prochains mois. Enfin, comme le souligne Michel Mouillart, si nous analysons les prix, nous analysons aussi les transactions. Cependant, le fait que les premiers acheteurs et les jeunes familles éprouvent des difficultés à obtenir un crédit conduit à une diminution proportionnelle du nombre de transactions avec des montants faibles ou des prix plus bas par m². Mécaniquement, le prix moyen de transaction augmente alors. D’autant plus que dans la schématisation, il est clair que la crise ne perturbe pas les transactions dans les districts si chic Paris…
La hausse des prix serait-elle également alimentée par les difficultés rencontrées par les candidats à la première adhésion ?

À la suite de l’explosion du télétravail, les maisons sont plus recherchées qu’auparavant. Quelles villes de taille moyenne, proches des métropoles, pourraient être un grand succès ?

Le télétravail nécessite de l’espace. Et les appartements n’ont pas été conçus à cet effet.

Cet intérêt renouvelé pour les habitations marque-t-il la fin de la métropole de croissance qui a jusqu’à présent poussé les Français à vivre près des métropoles où se concentrent les nouveaux emplois ?
Michel Mouillart : Disons qui semble que ce que j’appellerais « toute métropolisation », c’est-à-direla mobilisation de toutes les ressources publiques des politiques de logement et de logement afin de promouvoir la concentration urbaine, si je peux me permettre ce raccourci, il semble contredire les aspirations des familles qui veulent plus d’espace. Enfin, ne nous cachons pas, le télétravail n’est pas à la portée de tout le monde… Parce que ceux qui télécommute ne sont pas des techniciens de surface ou des caissiers de supermarché. En revanche, ce sont souvent des familles riches.
Bertrand Gstalder : En fin de compte, l’idéal serait de parvenir à un équilibre national, de veiller à ce que davantage de villes accueillent les administrations et créent de nouveaux emplois. Bordeaux, Nantes et Lyon sont sur la bonne voie, mais il reste encore du chemin à parcourir car la France reste un pays très – et aussi – centralisé .
Nous pouvons donc nous attendre à un ralentissement dans la métropole de la croissance ?
Bertrand Gstalder : La décentralisation n’est pas décrétée et est une approche à long terme. En ce qui concerne la métropolisation, il faut noter qu’il n’a pas dit sa dernière parole et que la réalité économique prévaut. La population des métropoles continue d’augmenter. La demande sur les grandes villes renforce la pression sur les prix . Et la plupart des nouveaux emplois continuent d’être créés dans les métropoles.
Michel Mouillart : Après avoir supplié cela pendant de nombreuses années, je ne peux que le souhaiter ! Mais je note que les mesures propices à cette métropole sont très puissantes : la restriction des conditions d’accès au PTZ dans la nouvelle, ou la lutte contre le sol artificiel, qui vise à restreindre la construction de maisons unifamiliales en dehors des grandes agglomérations, lorsque celles-ci ont pas de terrain sur lequel construire les maisons beaucoup aspirent… Enfin, il convient de noter qu’en France, le pouvoir politique était concentré dans les grandes métropoles…
Certains territoires offrent moins d’accès à Internet et disposent d’une infrastructure de transport moins efficace que d’autres. Le changement d’aspiration des Français est-il susceptible de les pénaliser ?


Quelles pourraient être les conséquences de ce changement dans l’aspiration des Français ?
Michel Mouillart : L’évolution de la demande, dont nous assistons, va s’ajouter à la pression sur les prix des grandes villes. Dans le baromètre LPI Seloger, il est néanmoins extraordinaire de constater, avec l’effondrement du marché, que les prix des appartements n’ont baissé que dans deux villes en avril et mai. Les pressions sur les prix ont non seulement survécu à l’effondrement du marché, mais elles ont même été renforcées dans les métropoles. En mouvement , cependant, la demande ne fera pas baisser les prix dans les grandes villes . D’autre part, il renforcera les mécanismes de pression sur les prix dans les villes de taille moyenne. Les régions, qui permettent de limiter le temps de déplacement, connaîtront alors un développement que personne n’avait prévu avant l’éclatement de la crise sanitaire.

Certaines régions, comme la côte atlantique, seront-elles encore plus attrayantes qu’auparavant ?
Bertrand Gstalder : Pourquoi la façade atlantique a-t-elle autant de charme ? Plusieurs réponses à cette question : une bonne qualité de vie, un climat agréable, un réseau TGV qui vous permet de rejoindre rapidement la capitale depuis Bordeaux, Nantes ou Rennes, des aéroports couvrant de nombreuses destinations, une activité économique croissante, etc. des prix qui, bien qu’ils tendent à s’approcher de ceux de Lyon, restent relativement abordables. Tout cela contribue à renforcer l’attractivité de la côte atlantique , mais cela vaut aussi pour le sud-est de la France. Cependant, les prix ont tendance à être un peu plus élevés, mais une ville comme Aix-en-Provence, par exemple, n’a pas à rougir en termes d’attractivité.
Michel Mouillart : Tout territoire, dans lequel il y a la possibilité de combiner dynamisme économique, qualité du logement, sécurité du commerce, qualité des réseaux de transport et accès à Internet, sera sans aucun doute privilégié. Il s’avère que la côte atlantique est, en fait, privilégiée sur tous ces points.
C’ est d’autant plus vrai qu’il a été relativement épargné par le Covid…
Michel Mouillart : Bien sûr. Quiconque a écrit que l’avenir était dans le renforcement de la métropolisation a oublié que la concentration urbaine favorise la propagation des épidémies. Mais encore une fois, ce n’est pas nouveau. À la fin du XIXe siècle, l’introduction d’importantes politiques de santé publique visait déjà à lutter contre le développement des épidémies urbaines, favorisée par la concentration des populations autour des sites industriels. Aujourd’hui, tous les territoires qui ont pu préserver, parfois avec difficulté, la qualité de leur habitat ont été relativement épargnés. Sur l’agglomération parisienne, elle compte environ 20% de maisons individuelles, mais dans le Finistère, 85% est atteint. Et sur toute la façade atlantique, nous sommes 75 % des maisons individuelles sauf Bordeaux et Nantes. D’où l’attrait de ces zones géographiques, qui offrent une forme d’habitat adaptée aux aspirations de la demande et où les épidémies se sont moins développées qu’ailleurs.
Parce qu’il est capable de s’adapter aux nouvelles aspirations des Français (grandes terrasses, jardins partagé…), le nouveau marché peut-il voir renforcé son attractivité ?
Michel Mouillart : Ceci est très probable mais augmentera son coût parce que vous devez voir quele coût de la maison individuelle est supporté par l’acheteur . En retour, les avantages en découlent : un jardin, la tranquillité. D’autre part, si l’habitat partagé est construit en Ils sont créés jardins urbains ou périurbains et collaboratifs, qui supportera le coût de ces développements ? Certainement pas la communauté locale. L’organe directeur ? Dans ce cas, les loyers seront trop élevés pour la plupart des demandeurs de loyer. L’acheteur ? Seules les familles riches pourront faire face à ce surcoût. Pour être en mesure de se réaliser, les rêves doivent être financés.

La démocratisation de l’accès à un logement de qualité est-elle contraire à un filtre social ?
Michel Mouillart : Nous disons à un filtre économique et financier, qui est souvent le même. Il existe des régimes d’accompagnement et des aides financières qui permettent aux familles à revenu modeste devenir propriétaires… Mais il convient de noter que ces dispositifs, hélas, ne sont plus dans l’air du temps et qu’au cours de la dernière décennie, ils ont été largement dégradés…
Et maintenant, la question que tout le monde se pose : les taux vont augmenter ?
Michel Mouillart : Les banques sont des opérateurs économiques comme tout le monde. Peut-être un peu plus rationnel que la moyenne. Cependant, au cours des prochains mois, nous verrons une explosion de catastrophes. Ces créances ne proviendront pas des ménages ayant de fortes dettes foncières. Ils sont plus susceptibles de provenir de prêts consentis aux PME. Les établissements bancaires doivent donc prendre des précautions à cet égard. Cela ne signifie pas que les taux augmenteront considérablement, mais cela signifie simplement que la période de taux très bas est terminée .
Bertrand Gstalder : Les tarifs resteront bas. Cependant, il peut y avoir des changements de quelques dixièmes, mais les taux globaux devraient restent attrayantes jusqu’à ce qu’il y ait des changements substantiels dans les politiques des banques centrales. En passant, c’est essentiel à la reprise de l’économie. Le risque le plus important est, à mon avis, les restrictions aux conditions d’octroi de prêts immobiliers, en particulier pour les secteurs orientés vers les premiers acheteurs ou les professions affaiblies par la crise de Covid.
Pourquoi est-il plus difficile qu’avant d’obtenir un prêt immobilier ?

Michel Mouillart : Depuis un an, la Banque de France encourage les banques à relever les taux d’intérêt pour améliorer le capital. Cette reprise progressive a donc été souhaitée par les autorités monétaires. Au cours des trois premiers mois de 2020, les taux n’ont pas augmenté. Mais pendant la crise, ils ont augmenté plus vite que prévu. Cependant, depuis cette hausse, ces taux ont diminué et ne se déplaceront plus au cours des prochains mois. Par ailleurs, il convient de garder à l’esprit que les conditions des prêts accordés ont été prolongées. Et plus les durées sont longues, plus les taux sont élevés. C’est un effet mécanique. Il ne faut donc pas craindre de relever les taux qui nuiraient à la reprise. Si l’accès à la le crédit s’est durci depuis décembre 2019, et pas seulement depuis mars, comme beaucoup semblent le suggérer, c’est pour répondre aux demandes de la Banque de France : ce ne sont pas les banques qui ont décidé de durcir, c’est limiter le respect des « recommandations » que le gouverneur de la Banque de France avait, d’ailleurs, accompagnée de menaces de sanctions éventuelles.
Qu’ est-ce qui nous attend ?
Michel Mouillart : Pour les six prochains mois, en termes de prix, j’exclut totalement la grosse crise que certains prédisent. Cependant, un ralentissement de l’augmentation est pratiquement assuré. Mais cela signifie que nous terminerons l’année avec une augmentation comparable, sinon légèrement inférieure, par rapport à ce que nous avons connu en 2019. C’est paradoxal, mais en cette période de crise, l’augmentation reste non seulement soutenue, mais aussi accélère ! Aujourd’hui, nous sommes à 5,1% sur un an. 2019 s’est terminé à 4,8%. Nous pourrions terminer l’année 2020 avec une augmentation annuelle de l’ordre de 3,5 à 4 pour cent, la France dans son ensemble . Ce qui sera, nous sommes d’accord, une bonne progression. Et encore une fois, ce n’est pas pour un mouvement à la baisse des prix que nous devons nous préparer, mais pour un ralentissement. Il est important de noter, cependant, que les prix ne changent pas de la même manière partout. A Toulouse, par exemple, ce ne sont pas ceux (pour la plupart des salariés à durée déterminée et des travailleurs temporaires) qui risquent de perdre leur emploi qui font les transactions les plus coûteuses… Certains territoires connaîtront une tendance négative des prix. C’est le cas de Nîmes, par exemple. Mais alors qu’ils étaient depuis longtemps à la baisse, les prix ont augmenté sur Limoges et Orléans. Et il y a six mois, peu d’entre eux auraient imaginé que les prix à Besançon pourraient augmenter de plus de 10%.

Je parie sur une reprise progressive du marché du logement, Bertrand Gstalder
La reprise se poursuivra-t-elle ?
Michel Mouillart : Quel rétablissement ? Le rebond technique ? Ce n’est pas une reprise, c’est un rebond. En termes d’activité, je suis donc tout à fait réaliste et, pour certains, pessimiste. Nous resterons sur un second semestre de 2020 paresseux . Et en 2021, c’est un retour lent et douloureux qui nous attend. Enfin, ce n’est qu’au début de l’année scolaire que nous verrons quel est le marché. Ce qui émerge dépendra en grande partie de la façon dont les banques ont pu libérer leur capacité de financement. Mais la Banque de France ne semble pas être sur le point d’alléger les contraintes qui obligent les banques à restreindre leur production de prêts.
Alors que plus tôt cette année, je m’attendais à une baisse de l’ordre de 100 000 achats de vieilles maisons par les familles entre 2019 et 2021 en réponse à la mise en œuvre des exigences de la Banque de France, je dirais aujourd’hui que le déclin sera beaucoup plus important : si, comme vous pouvez le craindre, rien n’est fait par les pouvoirs publics pour soutenir dans le secteur, ce déclin sera de l’ordre de 190 000 unités en 2020 et, au total, proche de 230 000 unités entre 2019 et 2021. Un vrai choc, alors !

Personnellement, je ne crois pas au scénario d’une reprise très forte et immédiate. Je ne crois pas non plus à un scénario d’effondrement de transaction à partir de septembre. Si vous pariez sur une supposition, ce serait sur un acquisition progressif.

